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Dans les casseroles
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  • 23 ans, diplômée d'une grande école, en reconversion dans la pâtisserie. Aime la cuisine, la culture, faire chauffer ses casseroles et écrire sur celles qu'on traîne avec nous. Tatouée / gourmande / curieuse de tout /
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29 août 2013

Splendeur et misère du speculum

 

Et la visite chez le gynécologue comme moyen de se sentir hyper mal en tant que femme, on en parle ?


En fait, je devrais dire LES gynécologues. J'ai compté, j'en étais à mon 9ème en début de semaine dernière et je me suis demandée si on ne pouvait pas me filer une carte fidélité, si je pouvais pas cumuler des points et gagner des goodies. Certains ont des problèmes d'angine chronique, moi j'ai des soucis d'intime, c'est comme ça, il faut faire avec. Mais du coup, j'ai pu constater que statistiquement, il y a BEAUCOUP de gynécologues pas très très doués du relationnel.

Les visites chez le gynéco, on en parle finalement peu. Parce qu'on préfère garder nos jardins secrets et nos problèmes de santé pour nous, parfois. Mais aussi parce que les maladies d'ordre sexuel sont souvent considérées comme encore-plus-dégoûtantes-que-les-autres-parce-que-ça-touche-des-sujets-tabous, parce qu'encore de nos jours on pense que chopper une MST révèle des choses compromettantes sur notre vie sexuelle (alors qu'un simple coup de stress peut faire surgir d'odieuses monstruosités dermatologiques, c'est ignoble mais c'est ainsi), parce que le sexe est encore très culpabilisant malgré la vulgarité de l'espace publique, parce qu'on a peur de passer pour "une pute" (là je soupire de fatigue parce que, bon, bref, c'est pas le sujet) ou pour une oie blanche qui ne connaît rien aux choses du sexe, ou encore parce que tout ce qui concerne "les trucs de fille" sont souvent considérées comme des maux sataniques par une grande partie de la gent masculine qui ne se remet toujours pas du fait que chaque mois, il y a du sang qui sort de nous - donc autant dire que nous nous devons de garder le secret - voir d'entretenir le mystère - sur tout le reste.


Le problème de tous ces tabous, c'est qu'on parle peu de ce qui se passe dans le cabinet des gynécologues.

Or, vu la teneur des problèmes qui peuvent y être évoqués, ces spécialistes devraient se montrer deux fois plus prudents que leurs confrères. Chacune débarque chez le gynéco avec son histoire, ses expériences, ses certitudes ancrées dans ce que nous ont dit nos parents dans l'enfance, ses limites sexuelles, ses peurs enfouies, ses traumatismes parfois. On est rarement remis en question quand on vient traiter une angine : par contre, un conseil de contraception ou l'apparition d'une MST fait surgir des paramètres qui ne concernent plus stricto sensu la médecine et la santé du patient mais sa vie privée, ses choix sentimentaux, ses limites. Et toujours cet aspect sacro-saint du sexe... D'où les maladresses, les incompréhensions mais aussi les violences qui peuvent compliquer une visite chez le gyéco, surtout si ce dernier n'établit pas de barrières claires entre son ressenti et les libertés de son patient.

Mes premières visites se sont très mal passées et m'ont mise très en colère. J'ai donc fait une liste non-exhaustive de ce qui m'avait le plus brisé les ovaires ces dernières années.

 

1) Les conseils débiles et culpabilisants

 

 photo gyn01.jpg

(oui, c'est une croix gammée à l'envers et donc un speculum-presque-nazi. Je me défoule aujourd'hui.)

Nombreuses nous sommes à avoir entendu un très froid "détendez-vous" qui serait censé déclencher l'épiphanie : mais oui, tiens, j'y avais pas pensé !! me détendre, mais c'est bien sûr, la clé est là, ralala si j'avais su plus tôt je me serais juste dé-ten-due quoi. Je l'ai généralement entendu alors que j'étais complétement à poil et les pieds dans les étriers (d'ailleurs si quelqu'un peut m'expliquer ce qui gênerait de faire l'examen mammaire APRES l'oscultation, ce qui m'éviterait de me retrouver nue comme au premier jour alors que j'ouvre grand les cuisses et montre l'Origine du monde à un(e) parfait(e) inconnu(e) ...) .

Surtout quand on vient parce qu'on a mal et que ça brûle et pique. Forcément, on appréhende un peu. Donc en toute logique, ça ne sert à rien de s'énerver sèchement sur la patiente qui a du mal à accueillir le speculum diabolique avec joie et décontraction du périnée, surtout si c'est pour y aller comme un(e) bourrin(e) après.

Dans la lignée des conseils pourris, j'ai aussi eu : " - vous êtes en couple ? - non, je suis célibataire. - Ha mais IL VA FALLOIR me trouver un homme alors !! c'est votre devoir de rentrée hein !!" ... et elle était sérieuse. Je n'avais pas compris. Déjà, y'avait possibilité de faire une énorme gaffe : peut-être viens-je de me faire larguer ; peut-être suis-je lesbienne ; peut-être suis-je heureuse d'être célibataire et suis obligée de me battre H24 avec le monde entier qui considère que le couple monogame constitue l'épanouissement prioritaire de tout individu sans exception ; et plus simplement, puisque dans mon cas, ce n'était pas un choix d'être seule : sans déconner, Captain Obvious, j'avais pas pensé à TROUVER quelqu'un !! j'avais pensé à chercher, mais trouver, ça jamais, c'est une révélation, je regrette pas d'avoir payé 60 euros le rendez-vous gynéco tiens.

2) L'ignorance médicale doublée d'un examen de conscience

Dans ma folle jeunesse, j'ai été en couple avec une fille. Notre relation nous aura un jour permis d'entendre ça :

 

 photo gyn02-1.jpg

Je ne vous raconte pas le débat de sourd qui s'en est suivi (et plus aucune de nous n'est jamais retournée le voir).

Je cite : "Une jeune fille n'est plus vierge quand le pénis d'un jeune homme a cassé son hymen. Sinon, elle est VIERGE, le reste n'a pas d'importance." Merci Docteur, ça valait le coup toutes ces années d'études et ces nuits blanches à ingurgiter un savoir anatomique impossible... pour sortir ça à ses patientes.
Quant à la protection contre les MST entre filles, elle n'existe pas, c'est fabuleux ! j'ai envie de dire : si les lesbiennes n'ont aucun risque de grossesse ni aucun risque d'être jamais malade du sexe : mais POURQUOI des rapports hétérosexuels ?? tant d'arc-en-ciel et de jeunesse éternelle sur l'île de Lesbos, c'est magnifique ! Je comprends que Roger du PMU du coin n'ai jamais pensé que le sexe entre meufs avait aussi son lot d'inconvénients et nécessitait parfois une protection, en cas d'aventure d'un soir ou de nouvelle partenaire, par exemple. Mais de la part de gynécologues diplômés qui ont cravaché comme des fifious toute leur jeunesse pour devenir des super-cerveaux, ça me donne envie de retourner leur speculum contre eux.

A cette époque, j'ai consulté plusieurs médecins et à plusieurs reprises, ces derniers se sont permis de me poser des questions sur mes "motivations" à sortir avec une fille. Ce qui est quand même incroyable. Ce n'était pas leur affaire. Je venais les voir pour des douleurs à traiter, des douleurs qui n'avaient rien à voir avec les précautions que je prenais. Ils me demandaient si je pensais que c'était sérieux avec ma copine, si j'avais fait mon choix, que je devais pas me précipiter, que c'était sûrement une phase. Et une fois, que le fait de vouloir des enfants me ferait sûrement changer d'envie (??!). A chaque fois que j'y repense, je suis terrifiée à l'idée de toutes ces jeunes filles qui entendent ce type de discours alors même que leur éducation est remise en doute par la vie et les rencontres, alors même que parfois leurs familles ne les soutiennent pas à la maison. Carnage.

 

3) Le je-m-en-foutisme

Un jour, je suis revenue avec des examens médicaux qui n'étaient pas particulièrement probants : le prélèvement ne donnait pas de réponses expliquant mes symptômes. La gynéco que j'avais consulté avait donc décidé de traiter un herpès, comme ça, parce qu'on est des oufs, même si rien d'indiquait un herpès plus qu'autre chose. A l'époque, ça m'a semblée chelou, mais je manquais trop de confiance en moi pour dire non.

Quant tu n'as pas d'herpès et que tu es traitée pour de l'herpès, il est fort probable que tu ne puisses plus t'asseoir pendant une semaine. Incroyable mais vrai, ta peau fait des trucs de designer, elle devient super créative.

J'ai remarqué qu'un gynéco décevant est souvent celui qui s'obstine à ne vouloir traiter que les grossesses. Avant d'être gynécologue, il est obs-té-tri-cien : c'est à dire, tout-puissant et très occupé, car doté d'une mission divine et sacrée : l'eeeenfaaaantemeeeent. Une jeune fille qui arriverait avec des symtômes difficiles à expliquer, qui mériterait un traitement de fond, qui obligerait à tatônner dans le protocole, serait donc gentiment reconduite vers la sortie, malgré ses souffrances (et son chèque qui aura payé la consultation).

 photo gyn03.jpg

 

Heureusement, il y a les perles rares... le 9ème, c'était le bon ! Champagne !! Plus de jugement, du professionnalisme, de l'écoute, des frais réduits, c'est paillettes et joie sur mes prochaines consultations, youhouhouh, Samba di Janeiro et plus encore !

 

Je terminerai cette note-défouloir par l'anecdote qui me fait encore rire des années après tellement je n'ai pas compris la déclaration de ce jeune médecin hirsute des urgences gynécologiques qui finissait vraisemblablement une looongue garde et qui ne m'a pas jeté un coup d'oeil avant ce moment :

 photo gyn041-1.jpgQuel est le fuck ?! tant de questions sans réponses, mais au moins, des années plus tard, j'en ris encore de ce "ah bah oui, forcément" complétement ambigu (forcément, je ne prends pas de contraception ? forcément, vu ma gueule, je sors avec une meuf ?) et de ce premier face-à-face au bout de 15 minutes, APRES qu'il ait mis la tête dans ma... bref. Au final, un bon souvenir.

Plus sérieusement, il serait temps de libérer la parole sur ces consultations qui se déroulent mal, celles qui font mal, celles dont on ressort sans être traitées en sachant que ça va continuer de faire mal quand on fera l'amour ou qu'on ira simplement aux toilettes.

Il serait temps d'oser dire non à certains médecins, d'oser poser des questions et poser des limites. Il serait temps que certains gynécologues se remettent en question. Et se remettent à jour aussi.

En attendant, bon courage à celles qui doivent consulter, je vous envoie des licornes et de la poussière magique par pensée.

 

 

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